Une exposition qui éveille les consciences à l’IESA arts&culture
Le jeudi 24 avril 2025, l’IESA arts&culture accueillait l’inauguration de Cuentos para no dormir, une exposition engagée portée par les étudiant·es du Bachelor 1 en In Arts Management (BAM 1), sous la direction de Milena Estrada, professeure à l’IESA, et de Dayneris Brito, project manager et conseillère de la collection d’art cubain de la Brownstone Foundation.
Réalisée avec le soutien de l’Ambassade du Pérou en France et en partenariat avec l’Association NOEMI – Espace Brownstone, l’exposition a permis à deux artistes majeures de la scène contemporaine latino-américaine, Violeta Quispe et Ivana de Vivanco, de dialoguer pour la première fois sur le sol français. Une première riche de sens, qui a marqué les esprits tant par son contenu que par l’émotion qu’elle a suscitée.
Un compte à rebours, entre luttes et transmissions
À rebours des contes traditionnels qui bercent et endorment, Cuentos para no dormir – littéralement « contes pour ne pas dormir » – propose de réveiller, d’interroger, de troubler. Loin d’une simple expérience esthétique, l’exposition est un manifeste visuel, un appel à penser autrement les récits dominants, à travers les prismes de la décolonisation, de l’oralité, de la pluralité culturelle et des luttes de genre.
Au cœur de ce projet : la volonté d’offrir un récit alternatif à l’histoire officielle, en confrontant les héritages visuels andins et baroques aux enjeux contemporains. L’art devient ici outil de résistance, de mémoire et de transmission, dans une scénographie pensée de bout en bout par les étudiant·es du programme.
Deux artistes puissantes, deux voix critiques
Violeta Quispe (Lima, 1989)
Artiste et activiste péruvienne d’origine Sarhua, elle revisite les Sarhua Boards, ces planches de bois peintes issues de traditions ancestrales. Dans sa démarche profondément féministe, elle détourne la figure masculine de l’Ekeko (symbole de prospérité) pour créer des Ekekas féminines et non-binaires, interrogeant les stéréotypes de genre dans les cultures andines. Son travail, mêlant pigments naturels, terres, acryliques et récits oraux, évoque autant les luttes collectives que les résistances intimes, en particulier celles des femmes invisibilisées.
Son œuvre a été exposée dans des institutions prestigieuses au Pérou, mais aussi récemment à la Biennale de Venise 2024.
Ivana de Vivanco (Lisbonne, 1989)
Artiste chileno-péruvienne installée à Berlin, elle développe un univers baroque, théâtral et critique. À travers ses peintures et vidéos, elle questionne les récits coloniaux et patriarcaux. Dans La Yegua de Santiago, elle renverse le mythe du conquistador, mettant au centre la figure de la jument émancipée, symbole de résistance et de puissance féminine. Son œuvre interroge les symboles du pouvoir et les figures d’autorité, dans un langage visuel à la fois satirique et profondément politique.
Un projet labellisé « Passeport pour un artiste »
Cuentos para no dormir a également été sélectionné dans le cadre du concours Passeport pour un artiste, le concours qui révèle les talents de la scène contemporaine péruvienne.
Lancé en 1998 par l’Alliance Française de Lima et l’Ambassade de France au Pérou, le concours national Passeport pour un artiste s’est imposé comme l’un des rendez-vous majeurs de la création visuelle au Pérou. Chaque année, il met en lumière de jeunes artistes émergent·es, en leur offrant une plateforme de visibilité et un accompagnement à l’international. Un tremplin unique pour les artistes visuel·les engagé·es et innovant·es.
Une soirée d’ouverture vibrante et émouvante
La soirée d’inauguration fut un moment fort de la vie de l’école. En présence de Marie-Sandrine Cadudal directrice de l’IESA, de Rolando Javier Ruiz Rosas Cateriano ambassadeur du Pérou en France, de Gilbert Brownstone, des deux artistes invitées, des enseignant·es encadrant·es et de nombreux·ses étudiant·es et familles, la galerie affichait complet.
Les prises de parole ont ponctué la soirée avec émotion et fierté . Marie-Sandrine Cadudal , monsieur Cateriano et Monsieur Brownstone ont souligné l’importance de l’art comme vecteur de dialogue entre les peuples.
Dayneris Brito, quant à elle, a rappelé le sens profond de cette exposition : mettre en lumière des voix marginalisées, dénoncer les systèmes de domination qu’ils soient patriarcaux, coloniaux ou artistiques et défendre une vision plurielle, inclusive et décentrée de l’art contemporain.
Une réussite collective, humaine et sensible
Au-delà des œuvres et des discours, l’ambiance chaleureuse, bienveillante et attentive a marqué l’ensemble des invité·es. On sentait chez les étudiant·es la fierté d’avoir mené à bien ce projet, dans toutes ses dimensions : recherche, médiation, logistique, communication et scénographie.
Cuentos para no dormir restera comme un moment d’éveil collectif, où l’art a su réunir, bousculer et faire vibrer, dans un espace d’échange entre générations, disciplines et cultures.